%0 Generic %J Faits de langue %D 2012 %T Valeurs temporelle et modale du conditionnel dans une langue sans flexion verbale : l’exemple du chinois %A Saillard, Claire %A Xiuwen Chen %X

Dans son introduction à la collection d’articles intitulée « Les problèmes linguistiques du conditionnel français », Dendale (2001 : 16) conclut par l’intérêt d’adopter une approche contrastive du conditionnel, en prenant en compte non seulement les langues romanes, proches du français, mais aussi des langues très différentes en termes de système temporel. Il s’interroge ainsi : « Que doit-on dire des langues qui ne connaissent pas la concordance des temps et qui ne connaissent donc pas de conditionnel temporel comme en français ? Peut-on dire qu’elles aussi ont un conditionnel ou doit-on dire justement que seules elles ont un conditionnel ? »

 

Dans une langue comme le chinois standard (pǔtonghuà), qui n’a pas de temps ni de modes verbaux, on se pose la question de savoir s’il existe des éléments aptes à véhiculer les deux principaux sens – temporel et modal – du conditionnel tel qu’il existe dans les langues romanes.

 

En chinois, la temporalité est généralement assumée par les adverbiaux temporels, et de manière secondaire, par l’interprétation temporelle dérivée des valeurs aspectuelles de l’énoncé (Saillard 2009). La modalité est quant à elle prise en charge par des verbes dits modaux (Alleton 1983, Hsieh 2005). Par conséquent, on ne s’attend pas à ce qu’un élément unique puisse prendre en charge ce que Dendale (2001 : 9) considère comme les “emplois canoniques de base” du conditionnel en français : sa valeur temporelle d’ultériorité et sa valeur modale d’éventualité. On peut aussi se demander si les trois principales valeurs modales identifiées par Dendale (Loc. Cit.) pour le conditionnel français – éventualité, emprunt et atténuation – sont ou non prises en charge par le même élément en chinois.

 

Dans cet article, nous montrons que le modal 会 huì couvre non seulement un certain nombre des usages modaux du conditionnel, mais aussi sa valeur temporelle d’ultériorité.

 

Après avoir détaillé les valeurs temporelle et modale de 会 huì, et les conditions sous lesquelles elles se réalisent dans les énoncés, nous nous interrogeons sur les propriétés sémantiques qui permettent à 会 huì de couvrir spécifiquement cette gamme d’emplois.