Langues de la zone Asie-Pacifique

Responsable : P. Caudal
Participants : P. Caudal, M.-C. Paris, C. Saillard, V. Pan, G. Fon Sing
Doctorants : J. Bednall ; LIN Ting-shiu.
Collaborations : J-L. Dao (CRLAO-EHESS), W. Paul (CRLAO-EHESS).

L’opération regroupe les recherches consacrées aux langues de la zone Asie-Pacifique, à savoir :

  • La description de la morphologie, syntaxe et sémantique verbale des langues australiennes (Caudal, Bednall), et en particulier des langues iwaidjéennes et gunwingguan de la Terre d’Arnhem (et plus spécifiquement l’iwaidja et l’anindhilyakwa) (P. Caudal, J. Bednall). Une attention toute particulière sera apportée aux systèmes verbaux de ces langues hautement polysynthétiques, et en particulier : (i) à la description morphologique de ces langues, rétives à une analyse morphémique « pure » (l’anindhilyakwa mêle ainsi des alternances avec des paradigmes d’affixes complexes et des phénomènes morpho-phonologiques complexes aux frontières entre positions du gabarit verbal – il est d’ailleurs souvent délicat de classer certains phénomènes soit comme de la simple affixation avec application de règles phonotactiques, soit comme des alternances de radicaux) ; (ii) à la description, l’analyse et la formalisation de différentes catégories du TAME dans ces langues. Celles-ci présentent en effet un fort degré de marquage composite dans l’expression de nombre de notions modales au sens large : avertif, frustratif, hortatif, contrefactuel… Avec, à minima, deux voire trois positions dans le gabarit verbal portant des marques de TAM, plus éventuellement des clitiques de sens modal (le purposif en particulier). Elles offrent un laboratoire idéal pour critiquer les approches « monosémistes » et purement compositionnelles des catégories sémantiques impliquant un marquage composite TAM telles que le contrefactuel, l’avertif, ou les événements négatifs passés (exprimé dans un grand nombre de langues australiennes par un tour irrealis passé et négatif, avec de la variation formelle et sémantique). Nous avons en effet toutes les raisons de penser, au vu du travail en cours sur la diachronie des contrefactuelles dans les langues romanes et germaniques (Caudal & Bednall 2016; Caudal 2016) et de sa convergence avec notre étude du TAM dans les langues australiennes non-pama-nyungan (Caudal, Nordlinger & van Egmond 2014; Bednall & Caudal 2016) que ces structures mettent en jeu un appariement forme/sens conventionnel, de nature constructionnelle, plutôt que purement compositionnel – en accord avec des approches du TAME telles que (Michaelis 1994; Michaelis 2011), faisant une place plus grande à la conventionnalisation que cela n’est très généralement cas dans la littérature sémantique depuis une trentaine d’années.

  • Parties du discours en mandarin et comparaison avec le français :(M.-C. Paris ;doctorante : LIN Ting-shiu): il s’agira de déterminer comment la non existence de certains phénomènes syntaxiques en mandarin doit être expliquée, comme par exemple l’élision du V (pas de V gapping) ou bien l’absence de montée de GN à droite (pas de right node raising) ou bien l’absence de différences entre pronoms personnels vs. pronoms réfléchis (il/*il-même mais OK lui-même). Les locatifs du mandarin seront également abordés, sous l’angle du traitement sémantique des N (- Loc) en N (+ Loc) et de leur syntaxe en chinois (avec une approche contrastive français/chinois).

  • La grammaire du SN en chinois et dans les langues formosanes (définitude et position de l’adjectif, notamment) (C. Saillard) : en chinois comme dans les langues formosanes (nous prendrons exemple du seediq), les différents types de référence nominale ((in-)définitude, référentialité, spécificité, généricité...) ne sont pas grammaticalisés au moyen de morphème spécifiques tels que les articles du français. En revanche, il existe une corrélation entre type de référence nominale et syntaxe externe ou interne du syntagme nominal. En chinois, on étudiera la relation entre type de référence nominale et position syntaxique des syntagmes nominaux dans la phrase, en s'appuyant sur le contraste mis en évidence entre position pré- et post-verbale (Xu 1995, Chen 2004, 2009). En seediq truku, langue à verbe initial, on s'intéressera à la syntaxe interne du syntagme nominal, en particulier à la position de l'adjectif, pour en décrire la valeur référentielle.

  • Micro-variation sur les dépendances A-barre: vietnamien / mandarin (Victor Pan ; Huy-Linh Dao (CRLAO-EHESS), Waltraud Paul (CRLAO-EHESS)) : Pan (2015, 2016a, b) argue qu’en ce qui concerne la résomptivité, le point de vue basé sur une macro-variation doit être abandonné au profit d’analyses fondées sur une micro-variation. On examinera ici les différents types de dépendances A-barre en chinois mandarin et ses dialectes ainsi qu’en vietnamien dans une perspective comparative. Nous nous intéresserons au wh-ex-situ, à la relativisation, à la dislocation ainsi qu’aux dépendances résomptives. Nous étudierons également la périphérie gauche dans ces langues. Les projections fonctionnelles écartées du CP dans la périphérie contiennent les positions A-barres ; nous mettons l’accent sur les dites particules-finales de phrase qui occupent la position de tête de ces projections périphériques. Une micro-variation est observée dans ces langues étudiées en ce qui concerne la hiérarchie des différents types de particules. 

  • L’étude du mouvement associé et de la grammaticalisation des verbes de mouvement/posture dans les langues australiennes et le créole mauricien (G. Fon Sing, P. Caudal, J. Bednall). Dans ces langues, les verbes de posture et de mouvement ont en effet acquis le statut de marqueurs au moins partiellement grammaticalisés, avec des interprétations commençant à dépasser le simple cadre du mouvement et de la posture dans un événement complexe ; ces effets de sens complexes restent cependant à étudier plus finement. Cette partie du projet sera adossée au projet Fédération TUL « EvEs » (« événements et espace ») (2019-2023), coordonné par P. Caudal, et regroupant une vingtaine de chercheurs dans sept laboratoires français ; le projet portera sur une étude typologique des langues avec mouvement et/ou posture associés, y compris avec leur grammaticalisations ultérieures (pour exprimer, par ex., la deixis, la structuration du contexte discursif, l’aspect, etc.). Il s’agira d’identifier et d’étudier les chemins de développements liés au mouvement et à la posture associés, à partir d’un échantillon typologique certes restreint (40 langues environ), mais déjà significatif par sa diversité.