Le passif, entre flexion et dérivation.

TitreLe passif, entre flexion et dérivation.
Publication TypeArticle dans des actes
Année de la conférence2011
AuthorsWalther, Géraldine
Nom de la conférenceCommunication invitée au séminaire interne du laboratoire MoDyCo
Date de publication24/06/2011
Conference LocationParis 10, Nanterre, France
Abstract

 

Au sein des approches lexicalistes de la morphosyntaxe, la question de la nature dérivationnelle ou flexionnelle de la passivation est un sujet récurrent. Le traitement traditionnel, représenté notamment par les travaux de (Stump, 2006) et (Hippisley, 2007) dans les approches contemporaines, en fait un phénomène flexionnel. Les approches mot et paradigme dans cette tradition considèrent que les formes actives et passives représentent des cases d’un même paradigme pour un lexème donné. À l’inverse, d’autres approches lexicalistes, comme celles de (Sadler & Spencer, 1998; Bresnan, 1982; Blevins, 2003; Sag et al., 2003), favorisent des analyses dérivationnelles.

Dans cette étude nous nous intéressons aux passifs en latin (Ernout & Thomas, 1953) et en kurde sorani (Thackston, 2006; McCarus, 1958), langue iranienne occidentale majoritairement parlée en Irak, en Turquie, en Iran et en Syrie (Haig, 2010). Ces deux langues possèdent des formes pour lesquelles les voix active et passive sont morphologiquement marquées. À l’aide d’arguments autant sémantiques que liés à la structure des paradigmes, nous montrons que les passifs du latin et du sorani (Walther, 2011c; Walther, 2011a) peuvent être analysés comme des cas de dérivation. Les arguments sémantiques s’appuient essentiellement sur imprédictibilité du sens des formes passives à partir des formes actives correspondantes, ce qui constitue une caractéristique propre à la morphologie constructionnelle (Boyé, 2011). Cette imprédictibilité est illustrée pour le latin par (Kiparsky, 2005) et par des données de (McCarus, 1958) pour le sorani.

Les arguments de structure des paradigmes s’appuient d’avantage sur une réanalyse des verbes dits déponents en latin. Pour modéliser cette réanalyse et la forme des paradigmes observables, nous utilisons un nouveau modèle entièrement formalisé de la morphologie flexionnelle et de l’interface morphologie-lexique (Walther, 2011b). Nous montrons que les déponents latins sont en fait des verbes hétéroclites et que les verbes passifs non “déponents” doivent être traités comme lexèmes majoritaire- ment dérivés des verbes actifs correspondants. Pour le sorani, nous nous appuyons par ailleurs sur des données originales supplémentaires (Walther, 2011a). Nous montrons que les propriétés des marques personnelles clitiques du kurde sorani (Bonami & Samvelian, 2008; Walther, 2011d) s’expliquent plus aisément si l’on admet une analyse dérivationnelle de la passivation en sorani.