La soutenance de la thèse de doctorat de Rémi Godement-Berline s'est tenue avec succès le vendredi 23 février à l'université Paris-Diderot. Sa thèse portait sur La focalisation prosodique dans la parole interprétée en français, dont vous trouverez ci-dessous le résumé :
La focalisation prosodique désigne le soulignement d’un constituant dans un énoncé au moyen de différentes ressources prosodiques, en particulier l’accentuation et l’intonation. Plusieurs fonctions sont attribuées à la focalisation : le marquage des différentes catégories de focus, ainsi que des fonctions emphatiques (ici appelées insistance et expressivité). Cette thèse a pour principal but de savoir si la focalisation et ses fonctions présentent des propriétés spécifiques dans le phonogenre de la parole interprétée, c’est-à-dire l’oralisation d’un texte écrit mémorisé au préalable par le locuteur (généralement un comédien).
Cette question présente un intérêt pour la linguistique et la phonétique à plusieurs titres. Tout d’abord, les différences de réalisation prosodique entre les fonctions de la focalisation sont encore mal connues. Par ailleurs, peu d’études ont été consacrées aux caractéristiques prosodiques de la parole interprétée. Enfin, notre thèse présente un apport sur le plan méthodologique à travers le protocole relativement novateur de ses deux expériences. Dans une expérience de production, des locuteurs ont reproduit des conversations spontanées en parole lue et en parole interprétée. Un groupe d’experts en prosodie a ensuite relevé les occurrences de focalisation dans le corpus et a effectué une classification fonctionnelle de ces occurrences. Nous avons également mené une expérience de perception afin de comparer la réalisation des fonctions de la focalisation indépendamment du phonogenre.
Malgré un taux d’accord entre experts relativement faible (ce qui soulève plusieurs questions méthodologiques et théoriques), nos analyses révèlent plusieurs résultats originaux. La fréquence d’occurrence de la focalisation est la plus élevée en parole interprétée, suivie de la parole lue. Ce résultat confirme notre prédiction et suggère que la parole interprétée est un phonogenre favorable à l’étude de la focalisation. Une forte relation est observée entre la fonction d’insistance et le trait d’accentuation initiale, ce qui confirme de nombreuses études précédentes. Le phonogenre se révèle en revanche avoir très peu d’influence sur la réalisation de la focalisation et de ses fonctions. Ce résultat est dû selon nous à un manque de données et au fait que certains traits prosodiques n’ont pas été pris en compte dans l’analyse.